Les autorités biélorusses ont relancé, depuis le 11 juillet 2025, une vague d’arrestations visant les participants aux manifestations post-électorales de 2020, selon les organisations de défense des droits humains Viasna et les anciens agents de sécurité regroupés au sein du réseau en exil BELPOL. Ces nouvelles interpellations surviennent alors que le délai de prescription pour les poursuites au titre de l’article 342 du Code pénal — relatif à la participation à des actions perturbant l’ordre public — approche de son échéance.
Une répression en décalage avec les signes d’ouverture récents
Cette reprise des répressions contraste avec les signaux de détente apparents envoyés par Minsk ces dernières semaines. Fin juin, à l’issue de la visite à Minsk de Keith Kellogg, émissaire spécial de Donald Trump sur les dossiers ukrainien et russe, 14 prisonniers politiques avaient été libérés, dont Siarheï Tsikhanouski, figure emblématique des protestations de 2020. Ce geste symbolique avait été perçu comme une tentative d’amorcer une normalisation des relations avec l’Occident.
Mais la vague d’arrestations de juillet vient balayer ces impressions. Elle souligne la persistance d’une stratégie duale du pouvoir : afficher ponctuellement une façade d’ouverture tout en renforçant le contrôle autoritaire en coulisses.
Une manœuvre préventive face à la perte d’emprise
Le retour aux répressions semble motivé par l’inquiétude croissante du président Alexandre Loukachenko quant à la stabilité de son pouvoir, après plus de 30 ans à la tête du pays. Malgré une popularité estimée à près de 40 % selon une étude non officielle menée par des experts britanniques, le président biélorusse semble ne plus considérer cette base de soutien comme suffisante face aux tensions géopolitiques croissantes.
Depuis 2020, le régime a intensifié son emprise sur les médias, Internet et la société civile, affaiblie par des années de répression. Plusieurs centaines d’opposants ont été emprisonnés ou portés disparus au fil des sept mandats de Loukachenko, entamés en 1994. La société reste profondément marquée par la brutalité de la répression d’État.
Entre Moscou, Pékin et une ouverture contrôlée vers l’Occident
Dans un contexte où la Russie s’enlise dans sa guerre contre l’Ukraine, Loukachenko cherche à réduire sa dépendance envers Moscou. Il a intensifié ses efforts pour tisser des liens économiques et diplomatiques avec la Chine, notamment à travers l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS), tout en multipliant les initiatives diplomatiques en Afrique et les gestes d’apaisement à destination des États occidentaux.
Officiellement, Minsk tente de projeter l’image d’un État ouvert sur le monde, malgré les sanctions et l’isolement diplomatique croissant. Cette stratégie de “multivectorialité” vise à camoufler la concentration du pouvoir autour d’un seul homme, tout en maintenant des lignes de communication actives avec divers blocs géopolitiques.
Vers un durcissement durable du régime
Malgré certains gestes d’ouverture, tout indique que le régime poursuivra sa stratégie de verrouillage intérieur. Les nouvelles arrestations, ciblant les figures du mouvement de contestation de 2020, illustrent une volonté claire d’empêcher toute résurgence de l’opposition en vue d’échéances politiques futures.
La simultanéité de gestes contradictoires — libérations sélectives et nouvelles vagues d’arrestations — révèle un pouvoir qui oscille entre la consolidation autoritaire et la recherche de légitimité internationale. Dans cette équation incertaine, les droits humains et les libertés fondamentales en Biélorussie continuent d’être les premières victimes.